Ici, dans la plaine de Ruzizi, la terre est riche mais capricieuse. Les agriculteurs travaillent d'arrache-pied avec de larges houes. Pas à pas, ils retournent la terre sombre que leur prête un propriétaire terrien local. Leurs coups sûrs et puissants creusent des sillons diagonaux conçus pour retenir juste ce qu'il faut d'humidité sans laisser pourrir le manioc. Le manioc est originaire de la plaine de Ruzizi. Il est cultivé en République démocratique du Congo depuis longtemps. Cette plante traditionnelle est plus riche en vitamines que les cultures uniformes destinées aux marchés industriels. Mais malgré sa richesse nutritionnelle et sa valeur culturelle, de nombreuses variétés traditionnelles de manioc ont quasiment disparu des cultures. Aujourd'hui, face à la famine et à la faim, la population a besoin d'une source fiable de nourriture. KCCA est déterminée à changer cela. Ensemble, ils font revivre le manioc indigène et les méthodes ancestrales de culture, honorant un savoir-faire presque perdu. Parallèlement, les femmes dynamisent leur communauté et s'imposent comme des figures centrales du leadership agricole. Mais ici, le climat est en train de changer. « Parfois il pleut, parfois non, et parfois la sécheresse détruit tout », explique Maria, une agricultrice et l'une des responsables du groupe. « Avant, la nourriture était délicieuse. Maintenant, avec les changements de saison, il arrive que les récoltes soient perdues. » Lorsque les récoltes sont bonnes, les femmes conservent le manioc de façon traditionnelle : elles étalent de la paille comme un lit, saupoudrent de cendres pour empêcher les tubercules de pourrir, puis recouvrent le tout de paille. « Comme ça, ils se conservent un an », explique Sada. « Dans les moments difficiles, nous pouvions en manger et en partager avec les familles qui n'en avaient pas. Le manioc est bon pour la santé de tous, il mérite d'être cultivé et préservé. » Ces femmes sont fières de leur travail. Elles parlent de leurs prochains projets : une nouvelle pompe à eau, un système d'alerte précoce à la sécheresse. Elles veulent économiser pour acheter leurs propres terres et envisagent un projet touristique. Avec soin, elles plantent rangée après rangée une culture traditionnelle remise au goût du jour, porteuses de culture, de résilience et de la force de femmes qui refusent de rester invisibles.